Perspectivia
Lettre1875_17
Date1875-12-05
Lieu de création29 Eschenheimerstrasse, Frankfurt a/Main
AuteurScholderer, Otto
DestinataireFantin-Latour, Henri
Personnes mentionnéesScholderer, Luise Philippine Conradine
Edwards, Edwin
Edwards, Ruth
Morrison, Madame
Bach, Johann Sebastian
Dubourg, Victoria
Thoma, Hans
Meyerbeer, Giacomo
Böcklin
Schopenhauer, Arthur
Dubourg, Jean-Theodore
Dubourg, Hélène
Deschamps, Charles W.
Lieux mentionnésLondres
Paris
Œuvres mentionnéesS Stilleben eines Fasanenpaars auf hellem Grund über grünen Zweigen (nature morte d'une paire de faisans sur un fond clair au-dessus de branches de verdure)
S Jagdstilleben mit aufgehängtem Hasen und einer Ente (nature morte lièvre suspendu et canard)
S Zwei kleine Vögel (deux petits oiseaux)

29 Eschenheimerst. Francfort a/Main

5 Déc [18]75

Mon cher Fantin,

Vous serez étonné de voir que nous sommes encore à Francfort. La santé de ma femme nous a retenus jusqu’à présent, elle n’est pas très malade, mais le médecin ne veut pas lui permettre d’entreprendre le voyage. C’est très gênant pour moi, puisque j’ai des affaires à Londres et vous savez, c’est le temps où on devrait être à sa place. Il y a déjà longtemps que j’ai reçu votre dernière lettre, dont je vous remercie bien. Vous avez demandé mon avis pour l’affaire avec les Edwards, mais je trouve que vous avez très bien fait comme vous l’avez fait, c’est de diminuer le nombre des tableaux que vous leur envoyés, alors tout cela finira par soi-même ; Mme Edwards m’a écrit elle désire beaucoup de m’avoir à Londres pour que je donne des leçons à la sœur de Mme Morrison, j’ai l’intention de l’accepter revenant à Londres.

J’ai travaillé autant que le temps sombre le permettait, j’ai fait une paire de faisans sur un fond clair,Scholderer, Stilleben eines Fasanenpaars auf hellem Grund über grünen Zweigen, B.145. Dans sa thèse, Jutta Bagdahn situe la réalisation de cette œuvre au milieu des années 1870, la lettre 1875_15 permet de la dater de 1875. un lièvre avec un canardScholderer, Jagdstilleben mit aufgehängtem Hasen und einer Ente, B.147. Dans sa thèse, Jutta Bagdahn situe la réalisation de cette œuvre au milieu des années 1890 ; comme en atteste la lettre 1875_17 cette nature morte date de 1875. comme pendant, et un petit tableau deux petits oiseaux,Scholderer, Zwei kleine Vögel, B.149. et le quatrième un chevreuilDans sa lettre du 5 janvier 1876, Scholderer écrit à Fantin qu’il a vendu à Deschamps ses deux natures mortes réalisées à Francfort, ce qui laisse penser qu’il n’a jamais achevé le chevreuil ; Jutta Bagdahn ne l’a pas inséré dans son catalogue. que, je crois, est bien réussi ce n’est pas encore tout à fait achevé. Je suis très curieux d’apprendre ce que vous avez fait, j’espère que ce n’est pas trop. J’entends beaucoup de musique, rien de nouveau, aussi nous allons quelquefois au théâtre, nous avons vu l’Africaine de Meyerbeer,Giacomo Meyerbeer (1791-1864), de son vrai nom Jakob Liebmann Beer, compositeur allemand. Son opéra L’Africaine est créé à Paris après sa mort en 1865. voilà une musique que je ne comprends pas du tout, je ne pouvais plus entendre la fin. J’ai entendu la grande messe en Si bémol de Bach fort bien exécutée par notre Cäcilien-VereinLes Cäcilien-Vereine (Unions Sainte-Cécile), fondées localement dans diverses villes allemandes au cours du XIXe siècle, avaient pour objectif de soutenir la pratique de la musique religieuse. cela vous aurait fait plaisir. Mais quel dommage que nous n’avons pas pu passer un part de ce temps à Paris. Mais pas de commande !

Comment va Mademoiselle Dubourg, qu’est-ce qu’elle fait, nous pensons beaucoup à vous tout, comme vous êtres heureux de vivre à Paris. Ici je ne vois rien qui m’intéresse. Thoma a envoyé des tableaux qui ne me plaisent pas, il se perd tout à fait dans la décoration et l’extravagance,Dans la première moitié des années 1870, Thoma est à Munich et subit fortement l’influence de l’art d’Arnold Böcklin et de Hans von Marées ; il crée alors des allégories de la nature très éloignées du réalisme qu’affectionne Scholderer. cela fait que je m’attache encore plus à la nature ; malheureusement mes yeux commencent à devenir plus faibles, je trouve que je vois moins distinctement qu’autrefois. Dites à Mademoiselle Dubourg que ma femme est plus désolée de ne pouvoir revenir à Paris qu’elle, mais elle espère bien qu’elle verra Mademoiselle à Putney.

Comment est la nouvelle bonne de Madame, est-ce qu’on en est toujours content ? Dites-moi si Monsieur Dubourg a commencé à traduire le livre de Schopenhauer. Nous comptons partir à la fin de la semaine, mais ce n’est pas encore sûr, nous devons rester deux jours à Düsseldorf, c’est très désagréable et pénible de voyager en cette saison.

Nous vivons très bien ici et on nous soigne bien, la vie en Angleterre va être bien différente. Je ne parlerai pas de vos affaires avec Mme Edwards, aussi elle ne parle pas de vous dans sa lettre, probablement elle a peur de se compromettre, je suis bien curieux de voir comment est lui et ce qu’il me racontera de vous, mais je ne m’en mêlerai pas et refuserai d’écouter leurs secrets. Dites bien des choses à Mademoiselle Dubourg et à Monsieur et à Madame de notre part. Bien des choses de ma femme à vous. Je vous dis adieu, ne tardez pas trop à m’écrire.

Votre ami

Otto Scholderer